« Ben alors Estelle, Reine du pétrole ? »

Publié le par Estelle Little

« Ben alors Estelle, Reine du pétrole ? »

J'avoue avoir choisi la bonne année pour venir en Russie. Au delà d'être spéciale pour moi, cette année est effectivement historique pour les russes.
Aujourd'hui (17 décembre 2014), en rentrant, le cours du rouble était de 89,10 roubles pour 1 euro. Du jamais vu ! Dois-je cependant m'en réjouir ? Et bien non en toute franchise ! Evidemment, je reste pragmatique et regarde le cours du rouble avant d'aller faire mes grosses courses, tirer du cash ou acheter des habits pour l'hiver. Mais d'un autre point de vue, les prix augmentent et surtout je ne peux que me sentir emphatique et compréhensive à l'égard des russes autour de moi, de ces gens que je vois faire la queue devant les distributeurs, des amis qui ne sortent plus car la valeur de leur salaire a diminué de moitié, des amis qui ont annulé leurs vacances en Europe prévues depuis si longtemps tout simplement car ils savent qu'ils ne pourront en profiter...

Je suis arrivée en Russie début août 2014. La situation politique était des plus tendues car deux semaines plus tôt, si vous vous en souvenez, l'avion de la Malaysian Airlines se crashait en Ukraine.

Le 7 août (soit 3 jours après mon arrivée), la Fédération de Russie annonçait son embargo sur les fruits, légumes, poissons et autres produits laitiers « made in the European Union » en représailles des sanctions occidentales (cf : http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/07/30/russie-de-nouvelles-sanctions-et-des-consequences-probables_4464666_4355770.html). En à peine une semaine : adieu les rayons de beurre président, et autres succulent fromages.. je sais que je ne suis pas venue en Russie pour gouter aux produits européens, mais tout de même, il arrive que dans des moments de perdition, je rêve de camembert ou de brie coulant.. bon tant pis ! (heureusement, les vins et spiritueux sont encore accessibles, bien qu'à des prix très élevés ce qui m'amène à m'essayer aux vins de Crimée et de la mer noire).

Bref, je me suis mise, comme tous les russes, à manger « local ». Mais pas local type petits producteurs qui vendent directement sur les marchés. Non, cette production là est toujours autant dans la panade dans la mesure où aucune aide spécifique ne leur a été apportée, malgré les circonstances qui aurait pu leur être bénéfiques. Non, non, quand je parle de « local » je fais référence à la production russe qui s'est reconvertie est s'est mise à faire « localement » (en Russie), tout ce qu'ils exportaient d'Europe. On se retrouve donc avec du Gouda, du brie et du Ricotta « made in Russia ». Parfois, à vouloir trop bien faire, ça en devient très comique (cf : cette espèce de fausse féta en brique qui se nomme « la vache de Paris ». Je vous laisse regarder le packaging avec Magui au pied de la tour Eiffel! Quel style!).

Bon pour en revenir aux choses plus sérieuses, sous l'effet du ralentissement mondial de l'activité, des fluctuations du prix du gaz et du pétrole, et des sanctions occidentale, la situation économique russe s'est drastiquement dégradée. Avec un cours de 1 euro = 46 roubles que je suis arrivée en août, nous en sommes maintenant à 1euro = entre 68 et 75 roubles selon les jours. Le Rouble a perdu plus d'un 1/3 de sa valeur en euro en trois mois et ceci, pour les russes qui sont passés par tant de crises, c'est (à juste titre) terrifiant. Ainsi, non seulement, ils souffrent des conséquences concrètes de ce qui leur arrive, mais en plus ils souffrent de leur désillusion. Qu'ils soient pragmatiques (et il y en a), où qu'ils croient dur en super-Poutine pour résoudre la situation, ils étaient tous devant les distributeurs aujourd'hui à tirer massivement (la limite a été posée à maximum 10 000 roubles/personne). Ils ont tous (re)pris conscience ou eu la révélation que leur pays n'est en fait peut-être pas la super-puissance-économique qu'ils pensaient qu'elle était. Ils se sentent donc plus vulnérables vis-à-vis de ces démoniaques américains et leurs larbins (l'UE).

Dans ce contexte, le 4 décembre dernier, Vladimir Vladimirovitch (Poutine) s'est exprimé : "Les sanctions n’étaient qu’une réaction nerveuse des Etats-Unis ou de leur alliés. Même sans la Crimée ils auraient inventé autre chose pour freiner les possibilités croissantes de la Russie […] cette manière de faire ne date pas d’hier". En d'autres termes, vous souffrez, mais consolez-vous, vous êtes du bon coté de la force seulement personne ne le comprend encore. Vous êtes des martyrs. Monsieur Poutine a aussi promis que d’ici quatre ans, « la Russie devrait avoir un taux de croissance supérieur à n’importe quel pays dans le monde ».

Je ne sais pas ce que vaut cette promesse, mais honnêtement, c'est tout le mal que je souhaite au peuple russe, car à l'instant, il est en souffrance. Mais pas dans une souffrance haineuse qui, comme chez nous-autres latins, nous amènerait à vouloir tout casser...Non, une souffrance quasi consentie et qu'ils endurent la tête haute, « pour la bonne cause », vraisemblablement en attendant que la roue tourne dans le sens du « juste ». Peut-être ceci sera-t-il d'ailleurs le cas, une aide chinoise vient de "tomber du ciel" (pour tout ceux qui n'était pas au courant de l'intensification des relations russo-cinoise depuis le début des conflits) https://www.facebook.com/QuotidiendeThailande/photos/a.320056538125711.1073741828.319726414825390/597718733692822/?type=1&fref=nf&pnref=story

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